Politique

Une analyse du procureur de la commune IV sur la situation du corps des procureurs et poursuivants du Mali, Hamidou Idrissa Touré.

C’est en vain que le magistrat se flatte de connaître la vérité et d’aimer la justice s’il n’a pas la fermeté de défendre la vérité qu’il connaît et de combattre pour la justice qu’il aime ». Le Chancelier.
La diversité des opinions semble avoir rallumé dans notre sein une espèce de « guerre civile » où ça dégaine de partout. Et quel spectacle pour les justiciables probablement surpris de voir que nous sommes « incapables » de cultiver et conserver entre nous cette paix qu’il nous revient à distribuer aux autres hommes. La discorde dégrade la magistrature et triomphe de sa gloire.
En un moment où tout est vindicatif surtout à l’extérieur du corps pour des raisons évidentes de saine distribution de la justice quelque peu entachée par des pratiques professionnelles isolées mais hautement préjudiciables, on serait grand de montrer même un semblant de cohésion tout au moins autour de l’essentiel.
Notre corps environné d’ennemis au dehors et portant les plus dangereux dans son sein, est plus que jamais à la croisée des chemins. Malheureusement comme il est facile de le faire, on accuse souvent des causes étrangères et peut être innocentes de la décadence de notre profession. Notre malheur vient de nous-mêmes. Nous effaçons tous les jours par des comportements peu orthodoxes le respect que l’on mérite des gens. Nous nous méprisons pour ensuite nous plaindre qu’on est méprisé. On n’impressionne presque plus personne et à la limite on inspire juste de la pitié aux gens quand ils nous voient nous leurrer de pouvoir illusoire. Ceux qui hier encore nous saluaient avec déférence n’ont pour nous aujourd’hui que mépris et dédain depuis qu’ils se sont accoutumés à nous rencontrer, nous voir ou nous toucher de plus près dans les commerces des mortels et autres lieux à gouter aux plaisirs défendus pour des gens qui se doivent s’élever au-dessus des autres. Nous ne sommes plus que l’ombre de nous-mêmes et on n’en est presque pas conscient pour perdre notre temps dans des vanités personnelles, des querelles de gamins nées de petites jalousies et rancœurs professionnelles. A chacun d’entre nous Dieu a prescrit ce qu’il est et qu’il doit être. Personne n’y peut et n’y pourra rien. Les autres nous tirent dessus et au lieu que cela soit un catalyseur d’union, on se donne en spectacle. Ressaisissons-nous même si les petites envies professionnelles qui se transforment en jalousies lesquelles en égoïsme voire en haine dans certains cas ne cesseront jamais entre nous. C’est humain donc ça peut se comprendre. Seulement que ça ne nous empêche de préserver l’essentiel : même un semblant d’entente, de cohésion ou d’union autour de l’essentiel. Un frère commissaire de police me disait que leur corps était le plus divisé mais qu’ils restaient tous défendus en dépit par un seul syndicat. C’est cela sauvegarder l’essentiel. Du chancelier, nous retenons que le bon magistrat « …incapable de vouloir s’élever aux dépens de ses [collègues], il n’oublie jamais que tous les magistrats ne doivent se considérer que comme autant de rayons différents, toujours faibles quelques lumineux qu’ils soient par eux-mêmes lorsqu’ils se séparent les uns des autres mais toujours éclatants, quelques faibles qu’ils soient séparément lorsque réunis ensemble, ils forment par leur concours ce grand corps de lumière qui réjouit la justice et qui fait trembler l’iniquité… ».
Rappelons-nous que pendant que nous nous livrons en spectacle devant nos détracteurs ; que des écervelés et autres incultes parvenus distraient le peuple de leur sport favori : les diatribes, les brocards, les invectives ; d’autres, les seuls méritants de la république, se battent et meurent tous les jours au front pour que le pays continue d’être. Montrons leurs de la reconnaissance pour le sacrifice inégalé en essayant tant bien que mal de nous acquitter de notre part de dette envers le pays : faire correctement ou tout au moins, ce qu’il nous revient comme charges professionnelles au lieu de perdre du temps dans ces guerres de clochers oubliant que le Mali ne se limite pas qu’à Bamako.
Stop maintenant aux communiqués opposés ! Chacun est fort mais ensemble on l’est tous et plus.
Idrissa Toure

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