Édito - Il faut le direLa Une

Mars 1991 : pardonner, mais ne pas oublier.

Mardi 22 mars, c’était l’anniversaire du vendredi noir, point culminant de la répression du régime dictatorial du Général Moussa Traoré : il y a de cela 31 ans ! Trente et un ans c’est beaucoup. Pour la majorité des maliens, que constitue la frange des 40 ans et moins (plus de 70% de la population), aussi bien cette date du 22 mars que celle du 26 mars date de la chute du régime de Moussa Traoré ne représentent pas grand ’chose, malgré la politique mémorielle mise en place depuis trois décennies pour qu’on n’oublie pas ces évènements. C’est ainsi, qu’il existe la semaine des martyrs, le carré des martyrs, le pont des martyrs, le monument de la démocratie, la pyramide du souvenir etc.


Quant aux maliens âgés de plus de 40 ans, ils se subdivisent en trois groupes : les inconditionnels du général, qui n’ont jamais digéré sa chute ; ceux qui ont été déçus de la gestion de l’ère démocratique et enfin ceux qui restent convaincus bien que très minoritaires- que tout va bien depuis mars 1991 ! Notons que les insatisfaits de l’ère démocratique ont été confortés dans leur opinion par la dégradation de la sécurité, la corruption à ciel ouvert, l’impunité, la dégradation
de l’éducation, de la santé, la déliquescence de l’armée, de la justice, etc.


A posteriori on s’aperçoit que puisqu’aucun travail d’explication historique de la nécessité démocratique n’a été fait, c’est tout une frange de la population qui en vient à considérer qu’un régime dictatorial était préférable à une démocratie considérée comme imposée par l’Occident. On a vite oublié les acquis de la démocratie. On a oublié que la libération de la parole a amené le citoyen à être plus exigeant. On a oublié par exemple que dans le domaine de l’éducation, le spectacle d’enfants transportant leurs tables-bancs, on a oublié les salaires impayés des fonctionnaires de l’état pendant des mois, on a vite fait d’oublier l’élimination des cadres les plus compétents de l’armée nationale, on a vite fait d’oublier la fuite de cerveaux maliens vers d’autres d’horizons, les tracasseries des maliens de l’extérieur quand ils rentraient au pays, l’emprisonnement de syndicalistes, le matraquage des étudiants jusqu’à leur assassinat dont le seul tort était d’avoir demandé un meilleur cadre d’apprentissage – le 17 mars n’est-il pas l’anniversaire de l’assassinat d’Abdoul Karim Camara Cabral ?


On peut comprendre que les jeunes qui n’ont pas connu cette période de dictature se plaignent, mais, pour tous ceux qui ont vécu la période de dictature et qui disent que cette période était préférable, c’est insulter la mémoire de toutes les victimes de cette répression implacable qui s’est abattue sur le peuple malien pendant 23 ans ! On pourrait pardonner le mal fait, mais on ne devrait jamais l’oublier. C’est donc le sens de cette commémoration pour que plus
jamais une dictature ne s’installe dans notre pays.

…sans rancune
Wamseru A. Asama

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