La presse malienne est la grande orpheline de ce régime de transition. Les autorités de la transition n’ont pris aucune mesure politique, depuis leur arrivée, pouvant permettre à la presse malienne de travailler de façon responsable et indépendante.
Aujourd’hui, tout porte à croire qu’il y a une politique nationale insidieuse, savamment orchestrée, pour maintenir la presse dans la précarité afin qu’elle soit fragilisée, désorganisée et affaiblie, à la merci de toutes sortes de tentations au grand mépris de tous ses principes, en détruisant son impartialité, sa neutralité, son indépendante et sa responsabilité. Pour preuve, dès la rectification de la transition, la première mesure prise par les autorités a touché la presse. Elles ont décidé la restriction budgétaire, ce qui, dans leur habitude, doit frapper en premier lieu, le budget de communication qui a été coupé dans toutes les structures de l’État. Et du coup, tous les contrats signés des organes de presse ont été anéantis.
En effet, la presse malienne a actuellement déposé 6 projets de textes dont 3 projets de décret. Parmi ces projets de textes, il y a la révision de la loi sur le régime de presse pour donner aux multiples journalistes, leur noblesse d’antan. L’objectif de cette révision est de permettre d’accéder à une dimension qui est la dépénalisation des délits de presse. La Maison de la presse a aussi suggéré la révision des textes de la haute autorité de la communication (HAC) pour faciliter l’accès à l’information afin que l’information demeure un bien public. Les trois projets de décret déposés sur la table du gouvernement depuis bientôt un an, restent préoccupants, car les autorités de la transition n’ont pas daigné encore toucher à ces textes. Ce qui justifie, à suffisance, leur mépris et leur manque de considération à l’égard de la presse dans son ensemble.
Dans ces trois textes, il y a le projet de texte sur la presse en ligne, car, le Mali est pratiquement le seul pays au monde qui n’a pas encore adopté une loi sur la presse en ligne. Ce qui crée aujourd’hui, une confusion sans précédent entre les médias sociaux et la presse en ligne auprès des populations. Les deux autres textes portent sur l’attribution de la carte de presse qui doit incomber aux organisations professionnelles de la presse et non au gouvernement pour permettre aux faîtières de presse, de contrôler et de sanctionner les détenteurs illégaux. Et l’autre concerne l’indexation de l’aide publique à la presse au budget de l’État pour un taux de 0,025% qui représente 5 milliards de francs CFA où 0,01% du budget qui équivaut à 2 milliards de francs CFA. Signalons qu’au Mali, il y a actuellement plus 450 radios privées, plus de 200 journaux, 42 chaînes de télévision et 60 journaux en ligne.
Pour que ce combat réussisse, la presse malienne doit compter sur l’ensemble des faîtières ainsi que tous les segments de la démocratie afin que la presse soit de plus en plus professionnelle, indépendante et responsable. Aucun professionnalisme n’est possible s’il y a pas une presse indépendante, épanouie et capable de jouer son rôle. La presse ne saurait être digne tant qu’elle est entretenue dans la précarité et stratégiquement maintenue dans la misère pour qu’elle soit bafouée, dénigrée, muselée et jetée aux chiens comme un vulgaire rejeton de la démocratie. Cette refondation criée sur tous les toits ne peut pas se faire sans une presse libre, financièrement autonome et indépendante.
M. Camara