ABDOULAYE DIOP ALERTE L’OCCIDENT SUR LA MARCHE IRRÉVERSIBLE DE L’AES
« Avec vous ou sans vous nous allons avancer »
Dans le cadre du Forum de Crans Montana, tenu à Bruxelles le 27 juin 2024, un panel consacré à l’Alliance des États du Sahel a suscité une discussion interactive animée par le ministre Abdoulaye Diop, en présence de hauts représentants du Burkina Faso et du Niger. Cet événement a permis de clarifier les enjeux et les perspectives de cette alliance dans un contexte marqué par de profonds bouleversements politiques et sécuritaires.
Le ministre Diop a débuté son intervention en remerciant les organisateurs et les participants, soulignant l’importance de fournir des clés de compréhension sur la situation actuelle au Sahel. « Les États du Sahel ne se limitent pas à trois pays ou au G5 Sahel. Le Sahel s’étend du Sénégal à la Somalie, incluant des pays comme le Maroc et la Libye, formant un continuum humain, géographique et géopolitique », a-t-il expliqué.
Il a insisté sur le fait que le Mali, le Burkina Faso et le Niger, actuellement en transition, traversent une crise profonde exacerbée par des interventions extérieures, notamment l’OTAN en Libye, qui ont déstabilisé la région.
Le ministre Diop a critiqué les sanctions économiques et financières imposées par la CEDEAO, qu’il juge illégales et contre-productives. « Il n’y a aucun texte de la CEDEAO qui prévoit la fermeture des frontières ou des banques centrales pour affamer les populations », a-t-il affirmé. Il a ajouté que ces mesures ont creusé un fossé entre les pays membres et ont menacé l’intégration régionale.
Malgré ces difficultés, les États du Sahel ont cherché à maintenir le dialogue. « La suspension ne signifie pas ostracisme et exclusion. Nous avons toujours appelé au dialogue, mais malheureusement, cela a souvent été ignoré », a-t-il déploré.
Face à ces défis, le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont formé l’Alliance des États du Sahel (AES) en septembre 2023. Cette initiative vise à renforcer la coopération militaire, économique et diplomatique entre les trois pays. « Nous avons mis en place une alliance militaire défensive pour faire face aux menaces existantes, mais nous allons au-delà avec une intégration économique poussée et une action diplomatique coordonnée », a expliqué le ministre Diop. L’AES repose sur la charte de Liptako Gourma et vise à transformer la région en une zone de sécurité et de développement intégré. « Nos ministres en charge des affaires étrangères et des finances travaillent à la création d’une confédération, prélude à une fédération des trois États », a-t-il annoncé. Le ministre Diop a réitéré l’engagement des pays du Sahel pour l’intégration africaine, tout en dénonçant les influences extérieures qui cherchent à diviser la région. « Nous voulons une organisation qui serve les intérêts de nos populations et qui soit pilotée localement », a-t-il déclaré. Et d’ajouter, « Qu’on soit pour la CEDEAO ou pour l’UEMOA, avec l’AES il y’ a une nouvelle politique, que vous l’aimiez ou que vous ne l’aimiez pas, peu importe. Pour nous le sort de nos pays ne va pas se décider à Bruxelles, à paris, Washington ou à Londres ça se décidera à Bamako, à Ouagadougou à Niamey etc. cette réalité géopolitique est là il faut la suivre…. Avec vous ou sans vous nous allons avancer. Si les européens ne serons pas là, les chinois serons, les russes serons là, les australiens seront là. Aujourd’hui, on n’est marié à personne… »
Cette session interactive au Forum de Crans Montana a permis de mettre en lumière les défis et les ambitions des États du Sahel, tout en appelant à une meilleure compréhension et à un soutien accru pour cette région stratégique.
Oumar ONGOIBA