Douentza : Pétaka se meurt dans un silence coupable
Pétaka capitale de la Commune de même nom, est un village d’environ 5 000 âmes, situé à 11 km à l’est de Douentza sur la RN 16, la route Sévaré / Gao.
Depuis 2019, cette capitale communale vit dans la hantise des terroristes avec des attaques incessantes.
Depuis 2019, les villageois n’arrivent pas à exercer avec quiétude leurs activités traditionnelles, à savoir l’agriculture, l’élevage et la culture maraîchère.
Depuis 2019, maire, enseignants et agents de santé ont déserté le village. Avec la multiplication des attaques et la non-assistance des FAMA et la MINUSMA, le village a été amené à mobiliser ses jeunes pour son auto-défense.
De 2019 en ce mois de juin 2021, on a assisté à 10 attaques dont : 04 en 2019 ; 02 en 2020 ; 04 en ce mois de juin 2021.
En dressant le bilan macabre de ces attaques, on relève 22 morts dont 12 en ce mois de juin 2021 !
S’agissant du nombre d’animaux enlevés ou tués, on relève plus de 1589, sans compter les charrettes, vélos, motos, brûlés ou emportés. C’est dire qu’aujourd’hui, même si les villageois devraient reprendre leurs activités, ils n’ont pratiquement à disposition que leur force de travail ; animaux de traite et machines agricoles ont été calcinés ou emportés.
De plus, la famine est présente. Très peu de chefs familles assurent un repas quotidien à leurs progénitures ; et cela à 10 km de Douentza où FAMA et MINUSMA ont leur base !
La seule fenêtre de ravitaillement pour les habitants de ce village est la foire hebdomadaire de Douentza qui se tient le dimanche. Les terroristes conscients de ce fait, tendent des embuscades aux forains, tous les dimanches.
Les villageois avec leur groupe d’auto-défense se défendent autant qu’ils peuvent, dans l’indifférence des FAMA qui, même si elles sont averties ne bougent pas. Elles accourent après les combats pour jouer au croque-mort ! C’est ce qui s’est passé le dimanche 27 juin 2021 où le bilan a été très lourd du côté de Pétaka avec 6 morts et 13 blessés dont un a eu une jambe amputée selon les sources médicales.
Comment tout cela s’est déroulé ?
Dimanche 27 janvier aux environs de 15 h – 15h30, comme d’habitude, les forains s’apprêtent à rentrer au village. Ils constituent leur cortège, avec autos et motos. Ce jour-là, le cortège comprenait 3 camionnettes, genres SOTRAMA et quelques individus à motos. Il faut noter que pour aller de Douentza à Pétaka, on passe par un poste de péage situé à 2 km de la ville et où les FAMA ont élu leur quartier.
Quelques minutes après des jeunes gens à motos arrivent au poste de péage et s’arrêtent pour attendre les deux dernières camionnettes. Quelques 20 minutes après leur arrivée au poste, ils entendent des crépitements d’armes à feu venant de l’est.
Habitués aux bruits de ces armes et sachant qu’une de leur camionnette est partie pour leur village, ils ont déduit qu’elle faisait objet d’attaques terroristes. Alors, ils demandèrent aux soldats d’alerter leur hiérarchie afin de porter secours aux passagers de la camionnette.
Les soldats disent niet : « nous n’avons pas reçu d’ordre, nous ne bougeons pas. Allez sauver vos parents ! ». Les jeunes qui étaient à motos ont donc pris le chemin de leur village. A leur approche, les bandits armés se sont retournés contre eux et la camionnette a pu rentrer à Pétaka.
Grâce à l’expertise du chauffeur qui a eu le courage et la bonne inspiration, d’accélérer malgré le mauvais état de la route, et aussi grâce à l’arrivée des jeunes, on a déploré qu’une seule blessée parmi les passagers qui étaient majoritairement composés de femmes.
Hélas, en contrepartie, il y a eu 6 morts et 13 blessés parmi les jeunes. Devant la résistance de Pétaka, les bandits armés ont pris la poudre d’escampette. Ce n’est que bien après que les FAMA sont sorties pour soi-disant ratisser et jouer comme d’habitude au croque-mort.
Pour les habitants de Pétaka, par ces menaces incessantes et par leur désir de les empêcher d’accéder à la foire de Douentza, les terroristes voudraient faire de Pétaka, un Farabougou ou un Dinagourou. C’est leur nouvelle stratégie en zone rurale, pour tout village qui refuse leur diktat.
Hélas, les habitants de Pétaka, se demandent aussi, si vraiment les FAMA et la MINUSMA sont là pour leur sécurité. Sans oublier qu’ils sont rackettés quand ils viennent à la foire pour vendre leurs petits caprins.
Est-ce cela le Mali Kura ? Les autorités devraient mener des enquêtes et revoir le comportement de leurs agents sur le terrain.
Une correspondance particulière de Douentza