Les motos taxis, une nouvelle aubaine pour des policiers Bamakois
De nos jours, il est difficile de quitter un point A pour un point B dans la circulation bamakoise sans voir un policier interpellé un moto taxi, appelé « Telimani » de tous. Ces interpellations se font généralement sur fond de contrôles de routine et souvent tout sauf réglementaire. Tout au contraire des normes, aucun reçu comme preuve de payement n’est jamais donné aux victimes. Mamadou, un jeune conducteur indépendant de moto taxis a été victime de cette situation.
« Nous, conducteurs de moto taxi, ne faisons pas confiance à la police, car ils font tout pour nous extorquer de l’argent » regrette Mamadou avant de nous raconter ce qui lui est arrivé. Ce jour 7 novembre aux environs de 10h un policier l’interpelle au grand marché de Bamako sans aucune infraction commise.
Selon ses dires, le policier en question lui demanda de présenter les papiers (le stationnement, l’assurance, et la vignette). « Ma surprise fut grande quand le policier me demanda de présenter le dédouanement en plus des autres papiers déjà présentés » ajoute-t-il. Pour ne pas perdre mon temps, je lui ai remis 2000 fois, conclut il.
Cette situation qu’a vécu Mamadou n’est que la partie émergée de l’iceberg. « Souvent postés à des coins improbables, les policiers nous guettent tels des gibiers », soutient Salif Coulibaly un autre conducteur de moto taxi. Que tu sois en infraction ou pas, prie Dieu pour qu’un policier ne t’interpelle pas, sinon l’infraction est commise d’office, continue-t-il. Il ironise même en disant, il (le policier) est capable de te demander les papiers de fabrication de l’engin s’il sait que tu as les papiers nécessaires.
Les conducteurs ne sont pas tout le temps victimes
Le 31 décembre 2020, la mairie du district de Bamako a pris l’arrêté N°067 M-DB portant réglementation de la circulation des Moto Taxis. Et nombreux sont les conducteurs de moto taxi qui ne sont pas en conformité avec les dispositions de l’arrêté. Presque tous les maliens se plaignent de la vitesse que prennent certains conducteurs avec ces engins, comme s’ils étaient à une course de moto de Rally, regrette le sergent « B », un agent de la circulation routière dont nous avons préservé l’anonymat. Il poursuit, il faut savoir que cet excès de vitesse est interdit par la l’article 7 de l’arrêté de réglementation. Donc, quand nous interpellons ces dangers de la circulation, nous ne sommes pas en porte-à-faux avec la loi, estime-t-il.
En plus de l’excès de vitesse, ils sont rares à se conformer aux principes de l’arrêté. Tous les 6 conducteurs que j’ai interrogés, aucun ne remplissaient toutes les obligations de l’article 3 dudit arrêté. Pourtant, il stipule que, que toute moto taxi doit, avoir une carte grise, avoir une plaque d’immatriculation, disposer d’un numéro d’identification apposé sur une plaque. Ce numéro sera en noir sur fond jaune fixé devant la moto et attribué par la Mairie du District de Bamako ;
et avoir comme couleur le jaune. Mais aussi être équipé d’un rétroviseur, au moins, de deux (02) places (conducteurs et un passager), d’une paire de repose-pied pour le passager, de l’éclairage fonctionnel et de deux (02) casques. « Pour nous, seuls l’assurance, le stationnement et la vignette sont importants, parce qu’avec ses papiers nous avons moins de problèmes avec les policiers racketeurs » confie Mamadou.
Profiter du désordre pour se faire de l’argent
Sachant que la plupart des conducteurs sont des analphabètes et ignorants de l’arrêté, certains policiers profitent et s’en mettent pleins les poches. Avec les Sotramas et taxis, ils acceptent 500 ou 1000 f. Mais avec nous, c’est 2000, 3000 ou rien, alerte Boureima conducteurs de moto taxi.
Ces propos de Boureima sont soutenus par le sergent « B » qui dit : Sauf les conducteurs des entreprises comme « TELIMANI » sont en règle. Sinon les conducteurs indépendants ne sont jamais en règle. Nous en profitons avant que la mairie ne prenne sa responsabilité et veiller à l’application stricte de l’arrêté, déclare-t-il. Et cette situation qu’a vécu ne me surprend guère, c’est le quotidien des motos taxis, conclut-il.
Issa Ongoïba
Encadré : Ces pratiques ont été dénoncées sur l’application Kenekanko. Une application disponible sur play store où on peut dénoncer en tout anonymat avec des preuves qui seront vérifiées par des journalistes pour publication. La plateforme est réalisée avec la collaboration de la Fondation Tiwindi, l’Union européenne au Mali, Amnesty international et plusieurs journaux.