Édito - Il faut le dire

Sonko est-il encore panafricaniste ?

La visite du Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, à Bamako a suscité de nombreuses interrogations, au-delà des apparences tant au Sénégal qu’au Mali. En effet, l’homme qui, avant d’accéder au pouvoir, se posait en champion du panafricanisme semble désormais s’éloigner de ce discours qui l’a porté au sommet. Si Sonko a tenté de rassurer lors de son entrevue avec la presse malienne, affirmant qu’il ne faut pas « mettre les émotions devant, » ses propos sonnent creux face à la réalité de son action politique. Ousmane Sonko, figure emblématique de la rupture avec l’ancien système sénégalais, avait su captiver une large partie de la jeunesse africaine en se présentant comme un fervent défenseur des peuples africains et de la souveraineté des nations du continent. Pourtant, depuis son accession au pouvoir, le leader sénégalais semble avoir abandonné ces nobles idéaux, préférant se fondre dans un pragmatisme qui frôle parfois le cynisme.

Lors de sa rencontre avec le Colonel Assimi Goïta, Sonko a plaidé pour un rapprochement entre l’AES et la CEDEAO, tout en se gardant bien de réitérer ses critiques passées contre cette organisation ouest-africaine qu’il qualifiait autrefois de relique néocoloniale. Cette volte-face surprend, surtout quand on se souvient de ses déclarations enflammées contre les sanctions imposées au Mali par cette même CEDEAO.

Aujourd’hui, Sonko parle de « coopérer sur tous les plans » et de « réunir les Africains au-delà de nos divergences, » mais où est donc passé le panafricaniste qui dénonçait sans ambages les ingérences extérieures et prônait l’autodétermination des peuples africains ? Ses tentatives pour justifier ce changement de cap en arguant que « les émotions’’ ne doivent pas guider les décisions politiques ne trompent personne. Ce discours, trop lisse, trop conciliant, marque un tournant inquiétant dans la trajectoire de celui qui, autrefois, portait l’espoir d’une Afrique résolument tournée vers son émancipation. La visite de Sonko au Mali aurait pu être l’occasion de réaffirmer ces principes fondateurs qui l’ont mené au pouvoir. Au lieu de cela, elle révèle un leader de plus en plus éloigné des idéaux qu’il prétendait incarner. Cependant, Sonko et son gouvernement n’ont pas encore un contrôle total sur la politique sénégalaise. Les prochaines législatives pourraient leur permettre de renforcer leur pouvoir et de revenir à leurs principes panafricanistes. Il est donc important de leur donner une chance de démontrer leur engagement. Si, malgré une majorité parlementaire, ils échouent à concrétiser leurs promesses, ils devront alors faire face à une responsabilité accrue et à des critiques légitimes. En attendant, l’espoir reste que le panafricanisme pourra encore se traduire en actions concrètes.

Sans Rancune

Wamseru A. Assama

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